La modernisation de la régulation du marché de l'art votée par le Parlement | Fieldfisher
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La modernisation de la régulation du marché de l'art votée par le Parlement

En février dernier, près de trois ans après son introduction au Sénat, la proposition de loi visant à moderniser la régulation du marché de l'art a été définitivement adoptée. Ce texte a pour objectif d'adapter le cadre législatif propre au marché de l'art, mais aussi de réformer une fois encore la profession de commissaire-priseur. Publiée au Journal Officiel du 1er mars 2022, cette loi est, sauf dispositions contraires, entrée en vigueur le 2 mars 2022.

Extension aux meubles incorporels du régime des ventes aux enchères de meubles

 
Afin d'adapter les ventes aux enchères aux nouvelles pratiques du marché de l'art, le régime légal des ventes aux enchères de meubles est étendu aux meubles incorporels (nouvel article L. 320-1 du code de commerce ; article 5 de la Loi n° 2022-267 du 28 février 2022 visant à moderniser la régulation du marché de l'art). Ainsi, cette extension vise à prolonger la réforme introduite par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, qui avait déjà étendu aux meubles incorporels la compétence des commissaires-priseurs judiciaires. Pour rappel, bien que la notion de meuble incorporel ne fasse pas l'objet d'une définition normative, sont réputés comme tels tous les biens qui ne comporte aucune matière comme les droits de propriété intellectuelle (marques, brevets, dessins, modèles et noms de domaine) ou les fonds d'exploitation tels que les fonds de commerce.
 
Néanmoins, restent exclus du régime légal des ventes aux enchères les meubles incorporels dont la vente est soumise à des dispositions particulières. Cela concerne les meubles incorporels dont le régime interdit la publicité de la vente comme les fichiers de données personnelles, ou encore les meubles incorporels répondant à un régime spécifique comme les titres financiers cotés.
 

Ouverture du marché français à d'autres professionnels français et européens

 

Dans la continuité des recommandations formulées en 2014 et 2018, respectivement par les rapports Chadelat et Chaubon-Lamaze, ce texte vient parachever la libéralisation de l'activité de commissaire-priseur initiée plusieurs années auparavant par la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000 portant réglementation des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, qui avait supprimé les offices de commissaires-priseurs, tout en créant une réglementation particulière à l'activité de ventes volontaires.
 
La loi visant à moderniser la régulation du marché de l'art poursuit ce mouvement en permettant à d'autres professionnels français comme européens de réaliser des inventaires, des prisées, et des ventes aux enchères publiques. Ainsi, les notaires pourront, sous réserve de plusieurs conditions, réaliser des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques (article 7 de la Loi n° 2022-267 du 28 février 2022 visant à moderniser la régulation du marché de l'art). En outre, les ressortissants d'autres Etats-membres de l'Union européenne satisfaisant aux conditions de qualification prévues par leur État d’origine pourront exercer en France l'activité de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques, voire s’établir dans l'hexagone (nouvel article L. 321-28-1 du code de commerce ; article 11 de la Loi n° 2022-267 du 28 février 2022 visant à moderniser la régulation du marché de l'art).
 

Substitution du "Conseil des ventes volontaires" par le "Conseil des maisons de vente"

 
La loi visant à moderniser la régulation du marché de l'art a remplacé le Conseil des ventes volontaires (CVV) tiré de la loi n° 2000-642 du 10 juillet 2000 par une nouvelle instance dotée de prérogatives inédites, le "Conseil des maisons de vente". Ainsi, plutôt que de supprimer l'autorité de régulation existante, le législateur a choisi de la moderniser. Cependant, s'il est prévu que son collège soit désormais composé majoritairement de représentants de la profession, cet organisme sera bien une autorité de régulation et non une organisation professionnelle de type ordinal. En effet, si la loi attribue au Conseil des maisons de vente la mission de soutenir et de promouvoir l'intérêt collectif de la profession (nouvel article L. 321-18 du code de commerce ; article 2 (I) (1°) de la Loi n° 2022-267 du 28 février 2022 visant à moderniser la régulation du marché de l'art), demeure entre les mains du Syndicat national des maisons de ventes volontaires la mission de représenter les opérateurs de ventes volontaires auprès des pouvoirs publics.

En outre, en plus d'être chargé de prévenir ou concilier tous différends d’ordre professionnel entre les opérateurs (nouvel article L. 321-21 du code de commerce ; article 2 (I) (1°) de la Loi n° 2022-267 du 28 février 2022 visant à moderniser la régulation du marché de l'art), la formation créée à cet effet au sein du Conseil des maisons de vente se voit confier la tâche de sanctionner les manquements des opérateurs de vente à leurs obligations professionnelles (nouveaux articles L. 321-23 et suivants du code de commerce ; article 2 (I) (2°) de la Loi n° 2022-267 du 28 février 2022 visant à moderniser la régulation du marché de l'art). Aussi, en confiant ce pouvoir disciplinaire au Conseil des maisons de vente, le législateur a veillé au respect du principe de séparation des pouvoirs. En effet, conformément à la jurisprudence constitutionnelle, la séparation des pouvoirs impose que - lorsqu'une autorité de régulation fait usage de son pouvoir disciplinaire - soient séparées les fonctions de poursuite et de jugement. De cette manière, une autorité de régulation telle que la Commission de Régulation de l'Energie (CRE) connait un Comité de Règlement des Différends et Sanctions (CoRDiS) dans lequel la décision finale est prise après que le différend ait été instruit par un rapporteur distinct du comité.

C'est pourquoi, au sein du Conseil des maisons de vente, l'instruction et le jugement d'une procédure disciplinaire seront confiés à deux organes différents, tous deux distincts du collège. Ainsi, toute procédure disciplinaire se verra, dans un premier temps, instruite par un magistrat judiciaire désigné comme commissaire du Gouvernement et assisté d'un ancien professionnel ayant cessé d'exercer depuis moins de cinq ans (nouvel article L. 321-23-1 du code de commerce ; article 2 (I) (2°) de la Loi n° 2022-267 du 28 février 2022 visant à moderniser la régulation du marché de l'art). Puis, dans un second temps, la procédure sera jugée par une commission des sanctions (nouvel article L. 321-23-2 du code de commerce ; article 2 (I) (2°) de la Loi n° 2022-267 du 28 février 2022 visant à moderniser la régulation du marché de l'art) composée d'un membre du Conseil d'Etat, d'un conseiller à la Cour de cassation et d'un ancien professionnel ayant cessé d'exercer depuis moins de cinq ans (nouvel article L. 321-23 du code de commerce ; article 2 (I) (2°) de la Loi n° 2022-267 du 28 février 2022 visant à moderniser la régulation du marché de l'art).

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