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Insight

COVID-19 – Impacts en matière de financements

La pandémie du Covid-19 qui touche actuellement le monde et a amené la France à se confiner a également pour conséquence l'adoption, en urgence, de certains textes par le pouvoir exécutif. Le gouvernement a ainsi promulgué une série d'ordonnances et décrets dont certaines dispositions impactent directement les financements en cours et intéresseront particulièrement établissements de crédit et fonds de dette.

Sont ainsi prévus des reports ou suspensions de délais contractuels (1), judiciaires ou administratifs (2), mais également diverses mesures visant à faciliter la continuation des affaires, comprenant des aménagements de certaines procédures de droits des sociétés (3) et diverses mesures permettant l'établissement à distance d'actes authentiques (4).

1.    Suspension de certaines clauses contractuelles
 
  • Période concernée
L’article 4 de la loi d’urgence n° 2020-290 du 23 mars 2020 a instauré en France un état d'urgence sanitaire de deux mois, expirant à ce jour au 24 mai 2020* (la "Période d'Urgence").

L'ordonnance 2020-306 du 25 mars 2020 traite des termes ou échéances de tout contrat (en ce compris tout contrat de crédit et/ou de sûretés) intervenant entre le 12 mars 2020 et le 24 juin 2020, soit la date intervenant un mois après la cessation de l'état d'urgence sanitaire (la "Période Juridiquement Protégée"): 
 
  • Clauses / mesures concernées
De nombreuses clauses destinées à protéger les prêteurs en cas d'inexécution contractuelle de l'emprunteur voient leurs effets suspendus. Ainsi, sont suspendus les effets des astreintes, clauses pénales (telles que les clauses de pénalités de retard dans les contrats de construction), clauses résolutoires et clauses de déchéance (telles que, notamment, les clauses d'exigibilité anticipé) ayant pour objet de sanctionner l'inexécution d'une obligation du débiteur dans un délai déterminé et qui auraient dû produire leurs effets au cours de la Période Juridiquement Protégée. Les prêteurs ne pourront donc pas se prévaloir de la non réalisation d'une condition suspensive au cours de cette période pour résilier un contrat, ou de la survenance au cours de cette période d'un cas de défaut lié au non-respect d'un délai pour prononcer l'exigibilité anticipée d'un crédit. 

Délai de régularisation. En outre, l'ordonnance 2020-306 du 25 mars 2020 confère au débiteur un mois supplémentaire à compter de l'expiration de la Période Juridiquement Protégée, soit jusqu'au 24 juillet 2020, pour régulariser sa situation. A titre d'illustration, pour toute échéance de paiement tombant entre le 12 mars et le 24 juin 2020, le débiteur pourra donc, sans encourir de déchéance du terme, procéder au paiement au plus tard le 24 juillet 2020.

Champ d'application. Dans la mesure où l'inexécution doit être liée au non-respect d'un délai, il est possible d'interpréter cette ordonnance comme ne s'appliquant pas à des obligations continues, comme l'obligation de maintien d'une assurance, par exemple, mais bien évidemment, seule la jurisprudence future pourra confirmer ce point.

Exclusion d'instruments financiers. Information pouvant principalement intéresser les banques de couverture dans le cadre des crédits structurés, ne sont pas concernées par les dispositions relatives aux reports et suspensions, les obligations financières résultant d'opérations sur instruments financiers et garanties y afférentes mentionnées aux articles L. 211-36 et suivants du code monétaire et financier, ainsi que les conventions conclues dans le cadre d'un système de paiement et systèmes de règlement et de livraison d'instruments financiers.

2.    Reports et suspension de délais légaux et réglementaires
 
  • Actes et formalités prescrits par la loi ou le règlement et actions en justice et recours
La mécanique est un peu différente pour tout acte, recours, action en justice, formalité, inscription, ou publication prescrits par la loi ou le règlement à peine, inter alia, de nullité, de caducité, de péremption, de prescription ou d'inopposabilité, et qui devraient être réalisés pendant la Période Juridiquement Protégée.

Pour ces actes, l'article 2 de l'ordonnance 2020-306 du 25 mars 2020 (selon une interprétation retenue par la circulaire du Ministère de la Justice du 26 mars 2020) a pour objet d’interdire que puisse être regardé comme tardif l’acte intervenu, non pas au cours de la Période Juridiquement Protégée, comme il aurait dû l'être, mais dans le délai légalement imparti pour agir à compter de l'expiration de cette période, dans la limite de deux mois. Ainsi, (i) si le délai légal pour agir est inférieur à deux mois, l'acte devra être réalisé dans ce délai à compter de la fin de la Période Juridiquement Protégée et (ii) si ce délai est supérieur ou égal à deux mois, cet acte devra être accompli au plus tard le 24 août 2020.

Pour reprendre les illustrations mentionnées dans la circulaire précitée :
  • ce report pourra permettre à un établissement de crédit bénéficiaire d'un cautionnement de réaliser au plus tard le 24 août 2020 son obligation d'information annuelle de la caution (qui devait normalement se faire avant le 31 mars 2020) ; 
  • pour un nantissement de fonds de commerce (normalement soumis à un délai d'inscription de 30 jours) conclu pendant la Période Juridiquement Protégée, les formalités d'inscription devront être accomplies au plus tard à l'issue d'un délai de 30 jours suivant le 24 juin 2020, pour que l'opposabilité de cette sûreté ne soit pas affectée.
 
 
  • Mesures administratives ou juridictionnelles
Permis et agréments venant à échéance. En vertu de l'article 3 de l'ordonnance 2020-306 du 25 mars 2020, les autorisations, agréments et permis de construire obtenus et dont le terme vient à échéance au cours de la Période Juridiquement Protégée sont prorogés de plein droit jusqu'au 24 août 2020.

Délais administratifs. Les instructions ou les délais afférents aux autorisations administratives (instruction ou délai de retrait pour les permis de construire, d’aménager...), en cours à compter du premier jour de la Période Juridiquement Protégée sont suspendus pendant cette période. Pour les délais n'ayant pas commencé à courir avant cette période, leur point de départ sera reporté à l'issue de cette période. De même, tout délai de recours contre un permis de construire arrivant à expiration au cours de la Période d'Urgence se verra également reporté.

3.    Assouplissement des règles de vie sociale

Pour ne pas bloquer tout fonctionnement économique et notamment ne pas retarder les procédures d'approbation des comptes, le pouvoir exécutif a assoupli les règles régissant la vie sociale des sociétés françaises. 
 
  • Comptes sociaux
Allongement du délai d'approbation des comptes. Pour les sociétés commerciales clôturant leurs comptes entre le 31 décembre 2019 et l’expiration de la Période Juridiquement Protégée, le délai de six mois imposé pour approuver les comptes annuels est prorogé de trois mois. Ainsi, pour une société qui clôture ses comptes au 31 décembre 2019, l'assemblée générale des actionnaires approuvant ces comptes peut se tenir jusqu’au 30 septembre 2020, au lieu du 30 juin 2020. 

Le calendrier de remise des documents à l'agent ou aux prêteurs risque donc de subir certains ajustements non contractuellement anticipés, qui, compte tenu de nos développements en section 1 ci-dessus, ne pourront pas donner lieu à une déchéance du terme. 
 
  • Délibération des organes sociaux et consultation écrite
Voie électronique et vidéo-conférence. Les prises de décisions des emprunteurs requérant des autorisations sociales sont aussi facilitées durant la Période d'Urgence. Ainsi, le gouvernement a étendu le recours à la transmission d'information aux membres des assemblées par voie électronique, élargi le recours à la vidéo-conférence dans le cadre des assemblées générales et des organes collégiaux d'administration de surveillance ou de direction.

Consultation écrite. Un dernier assouplissement intéressant les modalités de prises de décisions pourra se révéler fort utile dans l'hypothèse où, dans le cadre de la mise en place d'un financement ou d'un avenant, une autorisation sociale serait requise pour les besoins de la signature de documents de financement ou l'octroi de sûretés : le gouvernement a également généralisé la consultation écrite de certains organes sociaux, et ce, même lorsque les statuts ne prévoient pas une telle possibilité.

4.    Etablissement à distance d'actes authentiques

Enfin, pour les prêteurs requérant des sûretés hypothécaires, le décret n°2020-395 du 3 avril 2020 autorise l'acte notarié à distance pendant la Période Juridiquement Protégée, permettant la réception d'actes alors que les parties ne sont ni présentes ni représentées, dès lors que par un procédé garantissant l'identification des parties, l'intégrité et la confidentialité du contenu et agréé par le Conseil Supérieur du Notariat, le notaire est à même de constater le consentement des parties. La signature se fait alors par voie électronique.

*A ce jour, il existe un débat doctrinal sur la date exacte de fin de cette période, qui pourrait être soit le 23 mai 2020 à minuit, soit le 24 mai 2020 à minuit. Pour la clarté de l'énoncé, nous nous référerons au 24 mai 2020 qui est la date reprise par la plupart des publications, mais nous attirons votre attention sur le fait que les délais mentionnés dans la présente note pourraient le cas échéant être raccourcis d'un jour. En outre, cette Période d'Urgence pourrait être prorogée ou, bien que cela soit peu probable, raccourcie.

Les informations contenues dans cette note, bien qu'elles soient de nature juridique, ne constituent ni un avis juridique, ni une consultation. Pour tout litige ou problématique en rapport avec le sujet traité vous êtes invités à prendre contact avec notre équipe, qui est bien entendu à votre disposition pour toute question que vous pourriez avoir sur ces sujets 

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